Joëlle Ceccaldi-Raynaud m’a sauvé
17 mai 2013 Pas (encore) de commentairesDepuis l’affaire Cahuzac et ses étranges conséquences, à savoir l’obligation faite aux membres du gouvernement de publier leur patrimoine, Claude Bartolone est l’un des responsables PS qui a le plus renâclé à suivre à cette nouvelle mode de la transparence. Il n’est pas membre du gouvernement, mais en tant que président de l’assemblée nationale, il s’est vu plusieurs foisinterrogé sur son patrioine. En guise de réponse, M. Bartolone a déclaré en toute simplicité qu’il possédait une maison en Seine Saint-Denis
, sans plus de détails, et pour cause.
Il faut bien comprendre toute la portée symbolique des mots Seine saint Denis
. Entre les émeutes de 2005, les histoires de trafic de drogue, d’armes, le terrorisme islamo-musulman et toutes les conneries qui peuvent être débitées sur ce département, le 93 n’a pas très bonne réputation [1]. Et pourquoi c’est le bordel dans le 93 ? Parce qu’avec un taux de chômage de 12,7% en 2012, la Seine-Saint Denis est l’un des département les plus pauvres de France. Et les pauvres, c’est bien connu, ça fout le bordel. Donc quand Claudo dit j’ai une maison en Seine-Saint-Denis
, il faut comprendre j’ai une maison dans le 9 – 3, l’un des départements les plus pauvre de France, vous comprenez bien que je ne peux pas vraiment être riche, lâchez-moi avec vos histoires de patrimoine puisque je vous dis que je suis pauvre
.
Sauf que dans le 93, comme partout, il y a aussi des gens pétés de thunes. Claude Bartolomé en fait partie. Riche, c’est pas grave. Hypocrite ça l’est déjà plus. Hypocrite et homme politique, à mon sens, ce n’est pas compatible.
Le Canard enchainé a trouvé une photo de la terrasse de la modeste bicoque de Claudo. Techniquement, le vieux grigou ne mentait pas lorsqu’il déclarait posséder une maison dans le 93… Sauf que cette maison est somptueuse.
Le Canard a également retrouvé quelques phrases clés du cahier des charges que l’architecte devait respecter. Morceau choisi : « la notoriété du client conditionne une relative discrétion de la façade principale sur la rue, dans une zone pavillonnaire calme de banlieue ».
Claude Bartoloné a poussé l’hypocrisie jusqu’à déguiser la façade de sa maison de riche (et je le répète, riche, c’est pas grave) pour la faire passer pour un modeste pavillon de banlieue. On comprend mieux pourquoi il a montré une farouche opposition à voir son patrimoine de faux pauvre vraiment riche dévoilé.
Ce matin je me suis donc dit, ils sont vraiment tous pareils, à gauche comme à droite, hypocrites et menteurs. J’étais à 2 doigts d’appuyer sur le bouton rouge « tous pourris ». Et puis…
Joëlle Ceccaldi-Raynaud m’a sauvé
J’apprends que la mairie de Puteaux, dirigée par Joëlle Ceccaldi-Raynaud, a retiré des rayons de la bibliothèque municipale différents magazines de gauche, dont Marianne, qui avait publié il y a quelques semaines un dossier [2] sur l’affairisme dans le 92. En octobre 2011, la même mairie avait confisqué l’ensemble des exemplaires du canard enchainé dans les kiosques de la ville afin que les bon putéolois et putéoliennes n’aient pas l’opportunité de lire les méchancetés que de vilains journalistes écrivaient sur madame le maire, en l’espèce une affaire de pots de vin liée à l’attribution d’un marché de chauffage urbain.
C’est tellement idiot que ça en est risible. Idiot pare que les putéoliens peuvent faire 300 m de plus pour aller chercher leur journal dans la ville d’à côté, ou mieux, aller sur Internet.
Je teins à remercier chaleureusement Mme Ceccaldi Raynault car elle m’a donné une raison d’espérer à nouveau. Elle m’a convaincu par sa bêtise que la droite et la gauche, ce n’est définitivement pas pareil. Les pitoyables déclarations de Claude Bartolone sont aussi scandaleuses que la censure imbécile de Joëlle Ceccaldi-Raynaud. Mais si la classe politique, qu’elle soit de gauche ou de droite, se fout avec la même force et la même désinvolture de la tronche des citoyens, que ce soit à la maire de Puteaux ou au perchoir de l’Assemblée nationale, j’ai quand même l’impression que le travail est un peu moins grossier à gauche qu’à droite. Quitte à me faire insulter, je préfère que ce soit bien fait.
P.S. : en ces temps d’affaire Cahuzac, j’ai envie moi aussi de m’abandonner à la paresse intellectuelle et de tomber dans le « tous pourris » comme en témoigne ce billet. Mais non. Je reste quand même convaincu qu’il existe encore quelques purs en politique. J’en veux pour preuve la réaction indignée de Gérard Filoche le jour des aveux de Cahuzac. Il sont quand même peu nombreux en ce moment.
Illustration photo de Môsieur J. [version 8.0]’s sous licence CC.
- disclaimer, qu’on ne me traite pas de sale bobo parisien, j’ai passé toute ma jeunesse dans le 93
- en fait de dossier, faut pas trop déconner non plus parce que si je déplore le fait que Marianne) ait été supprimé des rayons de la bibliothèque municipale de Puteaux, je ne pense pas non plus que ce soit un grand magazine d’investigation, le dossier en question, n’étant en fait que la publication des bonnes feuilles du livre de Noël Pons et Jean-Paul Phillipe « 92 Connection », en matière d’investigation, on repassera, sans parler de cet article racoleur, mal sourcé, mal branlé sur le nouvel épouvantail du moment dans les médias, le deep web)