Contre le projet de loi Hadopi

3 mars 2009 , Pas (encore) de commentaires

Je m\’associe à l\’opération black out Hadopi… mais sans black out. Juste un petit relifting de blog en noir et blanc. Ceci pour deux raisons :

  1. j\’ai quelques doutes sur le fait que peindre son blog en noir fasse réagir nos députés du genre Oh ! Madre De Dios ! Je suis devenu daltonien ! Arrêtons tout de suite le projet de loi Hadopi ![1]
  2. le black out à la néo zélandaise pour efficace qu\’il soit ne permet plus à chacun de s\’exprimer sur ce projet.

Et je dis ça parce que évidemment, à l\’instar du professeur Rollin, j\’ai toujours quelque chose à dire et notamment sur le projet Hadopi.

\"HADOPI

Je suis contre le projet de loi Hadopi

Tout d\’abord, je clarifie ma position : je ne suis pas pour le piratage. Le piratage, c\’est de la contrefaçon. La contrafaçon est punie par la loi. Ceci étant éclairci, voici les raisons pour lesquelles je m\’associe à cette opération :

  1. il n\’y a pas de réponse plus imbécile que de couper l\’accès internet à quelqu\’un qui se serait rendu coupable de piratage. Si on coupe l\’accès internet à un pirate, ça ne l\’empêchera pas de copier des produits culturels (musique ou films) via un disque dur ou une clé usb. Et taxer encore plus ces supports n\’est pas non plus une solution car je rappelle au gouvernement qu\’il y a d\’autres personnes que les méchants pirates qui utilisent ces supports dans leur travail de tous le jours, comme les concepteurs web par exemple.
  2. comme l\’explique la quadrature du net, la commission Hadopi agira sur dénonciation d\’acteurs privés travaillant pour les industries du divertissement. Depuis quand la délation est-elle encouragée en France? Et depuis quand des acteurs privés se substituent aux autorités de l\’Etat pour dire que telle ou telle personne s\’est rendue coupable d\’un délit ?
  3. Ce genre de sanction à l\’encontre de l\’évolution des usages. Les acteurs de l\’industrie culturelle doivent comprendre qu\’ils ne pourront pas faire sans internet. Plutôt que de couper la chique à ceux qui téléchargent, ne serait-il pas temps d\’offrir à ce public une offre légale et intelligente de produits culturels en ligne ? A titre d\’exemple (édifiant), les formats de fichiers musicaux compressés existent depuis bientôt 10 ans. Le Itunes Store d\’Apple n\’a lancé son catalogue (complet) sans drm qu\’en février 2009.

Hadopi est une mauvaise réponse faite par des gens désemparés

Pour ceux que mes arguments n\’auraient pas convaincu, je les renvoie vers le site de la quadrature du net et surtout vers cet interview de Patrick Waelbroeck, professeur associé à l’ENST au département Economie et Science Sociale, qui explique pourquoi Hadopi est une mauvaise réponse faite par des gens désemparés. Je publie ci-dessous les extraits les plus éclairants de cette interview :

Vous avez passé en revue de façon trans générationelle les usages au sein d’une université, et passé en revu les usages de 600 personnes concernant leurs pratiques dans l’obtention de fichiers \ »piratés\ »
Les plus âgés préfèrent internet, car ils n’ont pas de réseau social bien développé en la matière, mais la différence la plus importante réside dans l’usage que l’on fait du fichier culturel numérique. Une grande proportion des étudiants sont ce que l’on peut appeler des “pirates”, ils ont pour principal objectif de se constituer une bibliothèque numérique gratuitement. Par contre on a une proportion très importante, de l’ordre de 15% à 25%, de gens qui copient pour découvrir, pour étendre leur culture, ce groupe n’est pas particulièrement caractéristique d’une classe d’âge, mais il est clair que l’on a à faire à ces deux populations. On constate une forte substitution à l’achat légal pour les “pirates”, ceux-là n’achètent quasiment plus de CD, mais ce que l’on voit également, c’est que ces gens là, au départ, n’achetaient que très peu de CD, ils ont généralement des revenus disponibles très faibles pour la musique légale et la substitution à l’achat joue beaucoup. Par contre, ce que l’on constate, c’est que ce sont ceux qui avaient un revenu disponible important pour acheter de la musique (et qui achetaient entre 10, 15 albums ou plus par an) ont utilisé internet pour découvrir de nouveaux horizons et élargir leur consommation culturelle, et cette population là, du coup, consomme plus de produits culturels légaux. Si on réduit l’accès au P2P, cela va diminuer la consommation culturelle de ce dernier groupe et du coup diminuer leur consommation légale. Quant au premier groupe, leur revenus ne leur permettra pas de consommer plus, de toutes façon. Au final, c’est mauvais pour la culture et pour l’industrie de la musique.

(…)

Donc si tout cela devient illégal, on aura un groupe de “jeunes” pour qui cela ne changera pas grand chose, ils auront toujours accès à la même culture mais le feront de façon masquée et clandestine, qui plus est, en mettant en place des réseaux humains qui enrichiront l’expérience liée au choix et à leur pertinence, rendant d’autant plus difficile l’arrivée d’une offre légale de substitution attractive. D’un autre coté les “anciens” seront exclus de tout cela.  Cela ne va t il pas accélérer une fracture culturelle entre la génération Y et digitale et les plus vieux ?
Oui, tout a fait. déjà aujourd’hui, je constate des pratiques culturelles que je maîtrise pas du tout et qui constituent déjà un clivage. Nous allons vers une société où les jeunes seront sur-cultivés, notamment en matière d’usages des technologies, avec un appétit, des besoins et une culture bien plus vaste et diversifiée, et une population d’“anciens”, nourris par l’industrie de la culture, en état de sous alimentation culturelle. On voit très bien cela dans la consommation des séries américaines, dont très peu sont distribuées en France. Les jeunes les consomment indépendamment du calendrier de diffusion imposé par les média et l’industrie culturelle, les anciens non. De là naît une véritable culture, à laquelle moi, je n’ai pas accès. On assiste à la mise en place de réseaux de pratiques culturelles, qui complémentent et se superposent aux usages de piratage, réseau qui se concrétise sur MySpace, Facebook, etc… Et tout cela échappe complètement à l’industrie et aux générations qui n’utilisent pas ces outils.

Extraits de l\’interview de Patrick Waelbroec par ReadWriteWeb, Hadopi est une mauvaise réponse faite par des gens désemparés

  1. Oui, quand ils sont énervés nos députés de droite, ils parlent espagnol

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.